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Kelp farming : une solution contre l’acidification des eaux côtières en Alaska

Texte écrit dans le cadre de la SHS Enjeux Mondiaux Climat.

Auteur·ices: Nour Ben jaafar (SV), Fiona Jetzer (SIE), Boris Méan (GC), Laura Orleth (SV), Léa Roberts (AR)

L’acidification des océans est un phénomène causé par l’absorption du C02 anthropique de l’atmosphère, entraînant une diminution du pH des océans. La coquille des crustacés se dégrade, les rendant vulnérables aux prédateurs.​1​ L’Alaska en est particulièrement vulnérable dû à la solubilité élevée du CO2 dans les eaux froides.​2​ L’acidification des océans touche l’industrie de la pêche qui est un pilier de l’économie locale. Un déclin des populations de poissons met en danger l’économie et la sécurité économique des travailleurs.​3​ Les alaskiens, en particulier les communautés autochtones, dépendent de la pêche de subsistance pour se nourrir. Un déclin des ressources ​*​entraîne des conséquences socio-économiques et culturelles importantes.​1​ L’acidification des océans représente un défi majeur en Alaska, mettant en péril son écosystème marin, son économie et son patrimoine culturel.

Une solution économique et écologique

Pour contrer l’acidification présente et future des eaux côtières d’Alaska il existe une solution qui pourrait être implémentée par les pêcheurs : cultiver une micro-algue appelée varech (saccharina latissima) avec leurs élevages de crustacés. Cette pratique de co-culture présente plusieurs avantages pour les pêcheurs et pour l’environnement. Par sa capacité photosynthétique, le varech absorbe du CO2 présent dans l’eau et ainsi augmente localement le pH. La croissance des crustacés n’est donc plus gênée par un milieu acide​4​, diminuant les pertes financières liées à l’acidification des océans. De plus, le varech se révèle intéressant pour de nombreux domaines industriels et sa culture permettrait de diversifier l’industrie maritime de l’Alaska.​5​

Des recherches actuelles de l’ACEP (Alaskan Center for Energy and Power) montreront si le varech pourrait entrer dans le secteur de l’énergie en tant que biocarburant​6​.

Outre ces arguments économiques, l’environnement profite également des cultures de varech : au-delà d’un refuge et habitat à la vie marine, le varech absorbe l’azote, dont la concentration élevée dans les eaux côtières est due à l’activité humaine​4​. Des exemples de co-culture de crustacés et du varech dans l’état de Connecticut montrent comment celui-ci peut rendre l’écosystème plus sain​7​.

Limites et risques

Bien que les froids océans côtiers d’Alaska présentent des conditions favorables à la culture de saccharina latissima​4​, le changement climatique impose que des modifications de ces conditions soient prises en compte. Une étude de cas dans le nord de l’Irlande montre que dès qu’un seuil de 14°C est dépassé pendant plus de 3 semaines, les effets positifs de la culture de saccharina latissima sont restreints, voire que la plante en décomposition deviendrait une source de problèmes​8​. De plus, un travail de recherche de l’Université d’Alaska montre que les moments de culture et de récolte sont cruciaux pour obtenir les effets souhaités​6​. Ces connaissances scientifiques devraient être transmises aux pêcheurs pour éviter le risque de perturber les espèces déjà présentes et ainsi rendre la culture de varech nocive pour l’écosystème. De la part des pêcheurs, la réalisation des cultures de varech implique une grande flexibilité dans leurs activités professionnelles. Cependant, il est à noter que la culture d’un pays, voire les traditions familiales, sont des habitudes qui ne s’imposent, ni se changent rapidement. Lors d’un sondage effectué en 2015, une grande partie de la population déclarait avoir des connaissances de base sur l’acidification des océans, mais la sensibilisation aux risques pour la pêche liée à celle-ci était encore faible​9​. De même, la diversification de l’exploitation vers la culture de saccharina latissima représente un investissement financier qui ne peut pas être réalisé par tous. Des campagnes d’information et des subventions de la part du gouvernement nous semblent donc indispensables.

Conclusion

Le sujet de l’acidification et ces solutions possibles ont suscité notre intérêt, car il représente une face moins visible et non négligeable de la vie sur Terre. Nous avons décidé de parler du cas critique et plantureusement documenté des côtes d’Alaska, mais nous devons nous rappeler que même depuis l’autre bout du monde, le sujet nous concerne tous!

Pour conclure, l’Alaska étant une région très dépendante de la pêche, autant pour des raisons économiques que de subsistance, les effets du changement climatique et en particulier de l’acidification des océans vont conduire à de graves problèmes socio-économiques. Comme supposé, l’utilisation de ferme de varech permettrait d’en atténuer l’impact par la diminution de l’acidité des océans et la diversification économique.

Crédit image: Tom Thai (CC BY 2.0)


  1. ​*​
    Ressources vivantes (animales et végétales) des milieux aquatiques marins ou dulcaquicoles ( eau douce) exploitées par l’homme (pêche, aquaculture).
  1. 1.
    Carmel M, Castaneda A, Garcia R, Horton S. Research Project for the 2009 Alaska Region National Ocean Sciences Bowl | Alaska Ocean Sciences Bowl. Projected Effects of Ocean Acidification on the Marine Ecosystem and Social Structure of Kodiak. Accessed May 9, 2023. https://seagrant.uaf.edu/nosb/papers/2009/kodiak-smart.php
  2. 2.
    Hurst TP, Cross JN, Long WC, et al. Alaska Region Acidification. Ocean Acification Program; 2023:138. https://oceanacidification.noaa.gov/wp-content/uploads/2023/05/3-4.-Alaska-and-Arctic.pdf
  3. 3.
    MATHIS JT. Ocean Acidification Risk Assessment for Alaska’s Fishery Sector. Synthesis of Arctic Research (SOAR); 2015.
  4. 4.
    Young CS. Kelp (Saccharina latissima) Mitigates Coastal Ocean Acidification and Increases the Growth of North Atlantic Bivalves in Lab Experiments and on an Oyster Farm . Frontiers in Marine Science. 2022;9:2.
  5. 5.
    Stekoll M. Could Kelp Be The New Energy Source? Could Kelp Be The New Energy Source? Published 2021. Accessed May 9, 2023. https: //uaf.edu/acep/news/news-archives/2013-2023/2021/19-april-acep-this-week/could-kelp-be-the-newenergy-source.php
  6. 6.
    Stekoll MS, Peeples TN, Raymond AET. Mariculture research of Macrocystis pyrifera and Saccharina latissima in Southeast Alaska . Journal of the World Aquaculture Society. 2021;52(5):1043-1044.
  7. 7.
    SCHIFFMAN R. Can We Save the Oceans By Farming Them? Yale environment 360. Can We Save the Oceans By Farming Them? Yale environment 360. Published October 6, 2016. Accessed April 30, 2023. https://e360.yale.edu/features/new_breed_of_ocean_farmer_aims_to_revive_global_seas
  8. 8.
    Dolliver J, O’Connor NE. Estimating growth, loss and potential carbon sequestration of farmed kelp: a case study of Saccharina latissima at Strangford Lough, Northern Ireland. Applied Phycology. Published online August 1, 2022:324-339. doi:10.1080/26388081.2022.2081934
  9. 9.
    Frisch LC, Mathis JT, Kettle NP, Trainor SF. Gauging perceptions of ocean acidification in Alaska. Marine Policy. Published online March 2015:101-110. doi:10.1016/j.marpol.2014.11.022

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