Cet article a été écrit par des membres de débouchés durables, un pôle d’Unipoly qui essaie d’aider les étudiant·e·x·s dans leurs recherches d’emplois dans des structures écologiques et sociales. Pour cela vous trouverez des outils pour naviguer le monde du travail “durable” sur leur site ainsi qu’une section avec des ressources pour vous accompagner dans la réflexion sur des thématiques en lien avec les débouchés durables. Celui-ci est ainsi leur premier article qui traite de la question du greenwashing.
« Vous recyclez, nous aussi », « Vous contribuez à réduire les émissions, nous aussi ».
En ce moment à Lausanne, il semble impossible d’échapper à la publicité de Glencore qui fait penser qu’il s’agit d’une entreprise exemplaire en matière d’écologie. Le premier onglet sur leur site web s’intitule « assumer la responsabilité » et se lit comme un plaidoyer à la construction d’un monde durable en train d’être mis en place par cette entreprise. Nous avons ici une illustration de ce qu’on appelle le « greenwashing » et qui est de plus en plus utilisé par toutes les entreprises. C’est quand des entreprises destructrices de l’environnement trompent et incitent par tous les moyens la population à penser qu’elles font partie de la solution au lieu du problème. Dans le cas de Glencore c’est particulièrement effrayant parce qu’il ne s’agit pas uniquement d’une entreprise avec une grande empreinte carbone. Glencore est une structure écocidaire avec des directeur·ice·x·s à sa tête qui prennent des décisions en toute conscience de l’impact néfaste que cela a sur l’environnement et les humains.
Pour remettre les choses au clair, Glencore est notamment une des entreprises à la tête du commerce de charbon et d’autres matières premières ayant encore augmenté leur exploitation de pétrole de 34 % comparé à l’année précédente.[1] https://www.fuw.ch/article/glencore-foerdert-weniger-kohle-und-kupfer C’est également l’entreprise qui a été désignée par PublicEye comme la « moins responsable » avec le plus de violations des droits humains de toutes les entreprises suisses (suivie par Nestlé, LafargeHolcim, Syngenta et Credit Suisse)[2]https://sehen-und-handeln.ch/content/uploads/2018/04/Factsheet_KoVI_D.pdf pour avoir entre autres empoisonné des familles et villages en République démocratique du Congo (RDC), en Zambie, au Tchad, au Pérou et en Colombie.[3] … Continue reading
Encore plus absurde, Glencore vient de gagner un procès contre l’Etat colombien qui avait voulu pénaliser l’entreprise pour le fait d’avoir pollué une rivière à côté d’une mine de charbon. Glencore réagit en portant plainte contre la Colombie devant un tribunal d’arbitrage. Il s’agit ici des tribunaux internationaux qui veillent le respect de traités internationaux et qui servent essentiellement à préserver les droits des actionnaires. En gros, l’existence de ces tribunaux permet à des entreprises multinationales de dénoncer des Etats qui auraient par exemple voté une loi en faveur de l’environnement, et de demander une compensation pour les profits potentiels futurs que l’entreprise ne pourra pas réaliser à cause du changement de loi dans le pays. Ces procès se passent de manière très peu transparente et sont souvent tranchés en faveur d’entreprises. Ainsi la peur d’être accusé devant un tribunal d’arbitrage est suffisante pour dissuader les gouvernements à prendre des actions en faveur de politiques de santé ou environnementales.[4] https://video.ploud.fr/w/ed0c9d0d-ecda-48e3-9632-e5063457e31a
Actuellement la Colombie doit à l’entreprise suisse 19 millions de dollars qui seront payés avec des impôts de la population colombienne et rempliront les poches des actionnaires de Glencore. Et entretemps le géant peut continuer de polluer et exploiter les ressources naturelles de l’Amérique du Sud.[5]https://lecourrier.ch/2022/02/17/firmes-suisses-toutes-puissantes-en-colombie/[6]https://responsabilite-multinationales.ch/etudes-de-cas/le-sale-business-de-glencore-en-colombie/
Nous avons choisi cette petite étude de cas pour notre premier article des débouchés durables car il permet de montrer noir sur blanc le pouvoir qu’ont les grandes multinationales pour mener leurs activités écocidaires et à induire simultanément en erreur les personnes qui ne sont pas directement touchées par les désastres humanitaires et environnementaux qu’elles causent. Le greenwashing est ainsi une tactique calculée utilisée par les entreprises qui vise à changer avant tout le marketing pour pouvoir continuer à produire des profits énormes sur le dos de l’environnement et des populations du Sud global.
La stratégie adoptée par Glencore fait également douter du fait qu’une transition écologique peut vraiment réussir dans un cadre où des entreprises sont dépendantes d’actionnaires mais également contraintes de montrer qu’elles font des efforts pour l’environnement pour satisfaire l’opinion publique. Si des entreprises comme Glencore se montraient vraiment sensibles à l’écologie, elles arrêteraient avec leurs activités, ou se restructureraient drastiquement. Mais bien évidement cela est risqué car par une transformation comme celle-ci, les profits diminuent et les actionnaires partent. Pire encore, dans des entreprises multinationales c’est actuellement les actionnaires qui détiennent le pouvoir de décision et il paraît donc peu logique d’attendre d’elleux qu’iels contraignent l’entreprise à faire moins de profits et leur rapporter moins de gains. Bien au contraire, nous observons un greenwashing dévergondé, pour pouvoir continuer encore quelques années à maintenir les taux de profits courants et même attirer encore plus d’investisseurs, qui croient soutenir une entreprise “verte”. Ce constat laisse donc peu d’espoir pour un changement “par le marché” et montre encore une fois le pouvoir de manipulation de certaines de nos chères entreprises suisses, et ses conséquences néfastes.Cependant, nous essayerons de finir sur une note plus positive en vous encourageant à voir des expositions organisées par le comité “multinationales responsables” qui visent à dénoncer Glencore et spécifiquement sa plainte contre la Colombie. Des intervenant·e·x·s venant de Colombie qui seront à Lausanne le 2 mai et à Genève le 3 mai 2022 nous parlerons de la situation dans le pays et de la manière dont on peut les soutenir. Vous trouverez plus d’infos concernant cet évènement sur leur site.
References