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Le ciment géopolymère: une alternative au ciment classique?

Le canard huppé n’est pas qu’un journal repère de militant.e.s gaucho-écolo. Non non !!! Nous souhaitons que toustes les étudiantEs puissent se sentir légitime à partager leurs écrits et s’exprimer ici. C’est pourquoi, quand les responsables du cours de Enjeux Mondiaux: Climate nous ont contacté pour proposer une publication des meilleurs travaux qui ressortent du cours, nous avons trouvé ce partenariat des plus réjouissants, d’autant plus qu’ils apportent une approche scientifique inédite. Les articles publiés ici sont donc directement issus des rendus des étudiants en propédeutiques pour leur cours de Enjeux Mondiaux. Nous vous invitons à initier une discussion dans l’espace commentaires et pourquoi pas aussi à publier des articles revisités de vos travaux en lien avec l’écologie et la durabilité.

La rédaction du Canard Huppé

Chaque année on fabrique environ 820 millions de tonnes de clinker afin de produire du ciment. Le secteur du bâtiment est responsable de 10% des émissions mondiales de GES. 52% sont dues au béton, dont la quasi-totalité par le ciment le composant. La Suisse, petit pays, produit pourtant environ 4,9 millions de tonnes de ciment (2018) par année pour sa seule consommation.

Le composant majeur du ciment est le clinker, composé de calcaire (80%) et d’argile (20%). Il doit être cuit à plus de 1450°C pour acquérir ses propriétés chimiques. Lors de ce processus, une réaction de décarbonatation (rejet de CO2 ) se produit, contribuant à 60% des émissions carbones totales du ciment. Le procédé contribue ainsi à l’effet de serre, donc au réchauffement climatique. Finalement, une fois refroidi, ce clinker est mélangé à du gypse et d’autres composants pour obtenir le ciment. Pour produire une tonne de ciment, 590 kg de CO2 sont relâchés dans l’atmosphère, 200 kg par les combustibles et le broyage, et 390 kg par la décarbonatation calcaire.

Afin de réduire l’émission de CO2 dans la production de ciment, on peut agir à différents niveaux. On peut intervenir sur la fabrication du clinker, avec des formulations permettant de diminuer l’intensité de la cuisson, ou utiliser des carburants moins carbonés (biomasse, déchets, …). On peut également intervenir sur la formulation du ciment et du béton, pour obtenir une proportion de clinker amoindrie dans le produit final. Ces bétons plus pauvres en clinker représentent la grande majorité des innovations actuelles (le CEM II/C-M et le CEM VI, fibrobéton). Or, on peut douter de leur efficacité sur le long terme car les émissions carbone de la décarbonatation du clinker sont incompressibles.

Les ciments géopolymères sont constitués de sous-produits-industriels. Leur cohésion chimique ne repose pas sur le clinker. Ils permettent de réduire l’émission de CO2 de la fabrication de ciment entre 40 à 90% (en fonction de la provenance des composants). Il durcit plus rapidement que le ciment classique (24h, 50% de sa résistance), grâce à un composé alcalin (silicate d’aluminium) user-friendly et non par hydratation cristalline (ciment classique). Tous ces sous-produits industriels sont disponibles en Suisse ; laitier (sidérurgie), cendre volantes (centrales thermiques), méta-kaolinite en solution (industrie céramique). La disponibilité des matières premières à une distance raisonnable des sites de production est une limite à sa démocratisation. En effet, les sous-produits utilisés sont en quantité limitée en suisse, et en diminution (ralentissement de la sidérurgie, objectifs de fermeture des centrales thermiques). Sa concurrence directe avec le ciment classique pose également un problème, quand on sait que des entreprises suisses comme Lafargeholcim sont au premier plan mondial.

Aujourd’hui, le ciment géopolymère peut être une réelle alternative au ciment classique sur le point technologique, économique et surtout écologique. Toutefois, il semble impossible de substituer la production de ciment classique par un ciment géopolymère à base de sous-produits à échelle mondiale. Certes son application est plus complexe et potentiellement nocive, mais n’est-ce pas un obstacle minime face à la crise climatique ?

Ou ne faut-il pas surtout revoir notre utilisation du béton de ciment, qui n’est nécessaire que
dans des ouvrages particuliers ?

Emilie Hamel, Carolina Pichler, Manon Frey, Noah Curinga, Marie Chatain

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